Interview Denis Olivier 19/05/2007
D.O ;exploitation du médium, une beauté du rendu.
1- Quelles ont été vos influences ?
D.O : Je n’aime pas trop répondre à cette question. Mais je sais que mes 2 influences majeures viennent de mes parents et de Jean-Loup Sieff. Mais aussi de la musique, de la peinture, du cinéma, de mes amis ou des personnes que je rencontre. Nous sommestous un peu des autres.
2- Sur quels formats, papier travaillez vous ? Argentique seulement ?
D.O : J‘utilise ce dont j’ai besoin en fonction de ce que je veux réaliser. Ce ne sont que des outils. Jusqu’à maintenant, j’ai eu des dizaines d’appareils photographiques, aussi bien argentiques que numériques, allant du Holga à l’Hasselblad, en passant par Kodak, Konica et Canon, une boulimie de tentatives, d’essais, d’expérimentations. Concernant le papier, j’utilisais le multigrade baryté de chez Ilford (voir http://www.denisolivier.com/laboratoire.php), et maintenant l’Hahnemühle A3 FineArt Pearl 285, pour lequel je collabore. Mais encore une fois ce ne sont que des outils, ils doivent être maitrisés pour obtenir le résultat souhaité, il faut les appréhender comme un moyen, une solution, et ne pas en devenir l’esclave, l’absence de matériel servant trop souvent de prétexte au manque de créativité.
3- Vous travaillez en noir et blanc. Le jeu des lumières et contrastes est très important dans vos séries. Qu’est ce qui vous a amené à aborder ce type de photographies ?
D.O : L’information couleurs est souvent de trop pour moi. Elle donne trop de repères temporels, de contextes, de modes ou d’ambiances. Dans le noir et blanc, il y a cette information manquante qui laisse souvent plus de place à l’imaginaire et à la suggestion. Visiblement je ne suis pas doué pour la couleur de toute manière, et d’autres le font avec grâce et inspiration. Au-delà de l’académisme, les noirs peuvent être bouchés, ou les blancs brûlés, si la représentation me satisfait, mon imagination comblera ces manques, une autre manière de s’approprier l’image. La perfection n’existe pas, et ceux qui courent après, bien souvent ne produisent rien et s’épuisent, passant à côté d’une foultitude de petits ressentis, toutes ces petites erreurs et autres imperfections qui font le charme et la singularité d’une œuvre.
4- Vos photographies parlent rarement de l’humain en tant que personne. Elles montrent des espaces très organisés. Pensez vous que vos photos répondent à une « mise en scène » volontaire ? Ou happez vous au hasard vos clichés ?
D.O :Le hasard quand je voyage existe. Mais le cadrage non. Je prête beaucoup d’attention à ce que je vois dans le viseur, la position des objets et leurs constructions géométriques. J’apprécie particulièrement les lieux où les traces humaines passées sont visibles, mêlant éléments aquatiques et phénomènes météorologiques. Je repère donc mes vues en fonction de tous ces éléments, lumières y compris, et le plus souvent tôt le matin ou au crépuscule, ou la nuit. Je le ressens un peu comme une conversation avec l’Univers, un moment privilégié, une forme de méditation. Le temps est aussi important, notre échelle humaine ne prend pas en compte celle de l’univers. Il semblerait que nous ne soyons rien dans ce cosmos infini, et pourtant, même si cela semble aller mieux, nous nous comportons comme si nous maitrisions le sort de l’Humanité avec une totale assurance. Pourtant nous ne savons toujours pas pourquoi, vers où nous allons, dans quel but, quelle finalité.
5- Pouvez vous m’expliquer votre démarche ? Vous considérez vous comme un plasticien photographe ou simplement comme un photographe ?
D.O :A choisir, photographe, comme précisé dans la question ci-dessous !
J’avoue que je n’y prête pas attention du tout.
6- En tant que photographe comment envisagez vous la visibilité de votre œuvre ? Quelles relations entretenez vous avec les spectateurs de votre œuvre ?
D.O : Ce travail est avant tout personnel, une évasion nécessaire du quotidien, lourd en responsabilités et parfois pesant. Longtemps j’ai gardé mes tirages dans boites d’archives avant l’avènement de l’Internet. A partir de ce moment là, d’autres liens se tissent, basés sur une même sensibilité, une certaine vision du monde et surtout de sa représentation.
J’apprécie aussi les expositions pour les rencontres que je peux y faire, de la confrontation de ma vision via un travail photographique choisi et présenté abouti, à celle des visiteurs.
J’apprends aussi beaucoup de ces échanges, ce qui permet de me remettre en question en permanence, de voir autrement, et de discerner de nouvelles perspectives de recherches. C’est terriblement motivant dans ce sens.
7- Quels projets artistiques avez vous actuellement ?
D.O : Beaucoup d’essais, de tests. J’aime découvrir aux hasards de recherches et d’erreurs. Mais cela demande beaucoup de temps. Je n’ai pas de projets établis hormis les voyages, qui peuvent être préparés ou imprévus, servant de prétexte à la photographie. Je me plais a photographier en ce moment avec un Holga, un appareil argentique en plastique chinois rudimentaire au format 120, à focale et vitesse fixe. J'aime beaucoup son rendu hors du temps, nostalgique et romantique et je redécouvre le plaisir du cliché sans technique, au feeling, de l'attente de l'apparition des images avant que je ne développe mes films.
8- Quel regard portez vous actuellement sur votre travail ?
D.O : Je suis plus distant. Je produits moins, j’essaye d’être plus constructif, plus efficace, moins brouillon. Je repense sans cesse les possibilités de cette représentation visuelle, qu’elle soit en amont ou en aval. Je cherche à m’affranchir des lois du marché (séries, numérotations, et autres obligations diverses et variées qui tiennent plus du commercial et du marketing), ce qui n’est pas évident. Mais cela serait surtout beaucoup plus honnête avec moi-même, continuer a photographier lorsque je le ressens, un instant particulier que je veux capter et dont je veux me souvenir, garder une trace, sans avoir de comptes à rendre, si ce n’est à moi-même.
2 juin 2007
Denis Olivier une photographie des possibles
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